Les Rothschild marient leur destin à de grandes familles européennes
Les
familles Dassault, Peugeot, Wertheimer ainsi que les Giuliani s'allient
aux Rothschild pour retirer la prestigieuse banque d'affaires de la
Bourse, aux côtés d'alliés historiques et de plus d'une centaine
d'associés.
Publié le 13 févr. 2023 à 17:35Mis à jour le 13 févr. 2023 à 19:56
Une
nouvelle ère s'ouvre pour la dynastie des Rothschild. Les plus grands
noms du capitalisme européen croisent leur destin avec celui des
banquiers pour les adieux à la Bourse de Rothschild & Co, quarante
ans après avoir fait renaître la prestigieuse banque d'affaires des
cendres de la nationalisation avec une poignée de fidèles.
Depuis,
ils n'ont eu de cesse de se renforcer au capital pour rester seuls
maîtres à bord et tenir à distance les tentatives de prises de pouvoir. A
l'issue de cette OPA, le risque en sera définitivement écarté et ils
pourront compter sur la puissance de leurs alliés.
Orange avec 6Medias, publié le lundi 13 février 2023 à 18h00
Lundi 13 février, Aurélien Saintoul a
invectivé le ministre du Travail à propos du nombre de morts dus aux
accidents du travail entre 2017 et 2019. Le député LFI s'est excusé
publiquement par la suite.
Nouvelles tensions à l’Assemblée nationale.
Lundi 13 février, le député de La France Insoumise, Aurélien Saintoul, n’a pas mâché ses mots face au ministre du Travail, Olivier Dussopt. "Nous n’espérons pas beaucoup de votre sincérité et de votre franchise. (…) Vous êtes un imposteur et un assassin",
s’est-il ainsi emporté, après avoir rappelé qu’entre 2017 et 2019, 33%
des accidents du travail ont causé la mort, dénonçant la suppression des
comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). La
séance a été suspendue quelques minutes avant de reprendre. Selon BFMTV, la majorité a demandé des sanctions contre le député LFI.
Des excuses entendues mais pas de pardon
Suite à cette séquence, Aurélien Saintoul a tenu à s'excuser auprès d'Olivier Dussopt, rapporte BFMTV.
"J'ai eu des mots que l'émotion et l'emportement m'ont fait mal choisir
et qui sont déplacés. Je souhaite les retirer et adresser des excuses
publiques au ministre. Je me tiens à sa disposition pour avoir un
échange plus personnel", a ainsi déclaré le député LFI. "J'entends vos
excuses, elles ont le mérite d'être présentées [...] mais qu'être traité
d''assassin' ne se pardonne pas", a rétorqué le ministre du Travail.
Sur Twitter, Élisabeth Borne a fermement condamné ces propos et exprimé
son soutien à Olivier Dussopt : "L’Assemblée nationale doit être le lieu
du débat, pas celui des injures. Ceux qui insultent ne sont pas à la
hauteur des Français qui les ont élus ni du débat démocratique qu’ils
attendent". Plus tôt, Olivier Faure, Premier secrétaire du Parti
socialiste, s'était exprimé au micro de LCP en considérant qu'il était
impossible de "qualifier un ministre qui n’est pas directement
responsable de ces morts au travail, d’assassin".
Suivez en direct la conférence sur la critique du capitalisme numérique de Cédric Durand ce soir à 19h !
Bonjour,
Cédric
Durand, chaire d'économie de l'Institut La Boétie, donne ce lundi 13
février sa première conférence sur la critique du capitalisme numérique,
intitulée :Technoféodalisme : une archéologie du futur.
"Des
milliers de personnes manifestent parce que c'est injuste que des gens
qui ont déjà eu la vie dure aient une retraite qui va rendre leur vie
encore plus dure. Ça devrait être le contraire", a expliqué la metteuse
en scène, avant d'adresser un message à la Première Ministre Élisabeth
Borne:
"Prenez huit jours et engagez-vous comme femme de chambre
dans un grand hôtel, vous allez en apprendre plus sur ce que c'est que
la pénibilité du travail que dans toutes vos études."
"La culture humaine"
Pour Ariane Mnouchkine, Élisabeth Borne est "une femme compétente, avec beaucoup d'érudition et de culture politique".
"Mais
ce qui est important, c'est la culture humaine, aussi. Je suis sûre
qu'un tas d'hôtels lui donneraient l'occasion de faire huit jours, avec
84 lits ou plus par jour, et elle verra si elle a envie de continuer
jusqu'à 65 ans", a-t-elle poursuivi.
Ce samedi quelque 963.000 personnes ont défilé samedi en France contre la réforme des retraites,
dont 93.000 à Paris, selon le ministère de l'Intérieur, des chiffres en
hausse par rapport à mardi où les autorités avaient recensé 757.000
manifestants au niveau national.
La captation de notre conférence sur les retraites avec Bernard Friot, Sylvie Durand et Michaël Zemmour est disponible ! #ReformesDesRetraites
➜ Rendez-vous sur notre chaîne YouTube : https://youtu.be/pU8b3brKQD0
D’une réforme des retraites à l’autre : les errements du macronisme
Un
texte purement budgétaire sans aucune portée sociale. Depuis quelques
mois, Emmanuel Macron et ses soutiens défendent une réforme des
retraites diamétralement opposée au projet qu’ils avaient initié en
2017. Un revirement qui en dit long sur ce pouvoir, son absence de
colonne vertébrale et ses arrangements avec la vérité.
C’estC’est
un souvenir désormais lointain que certain·es se remémorent avec
nostalgie tandis que d’autres lèvent les yeux au ciel à sa seule
évocation. Un souvenir dont personne n’ose trop parler depuis la reprise
des débats sur la réforme des retraites, mais qui plane sur toutes les
discussions du gouvernement et de la majorité présidentielle. Un
souvenir qui en dit long sur le macronisme, ses renoncements, sa
flaccidité et les vents contraires qui le traversent.
Alors que l’Assemblée nationale achève dans la confusion
sa première semaine d’examen du projet de loi de financement
rectificative de la Sécurité sociale (PLFRSS) et que la mobilisation se
poursuit dans la rue, une question reste en suspens : pourquoi Emmanuel
Macron a-t-il choisi d’abandonner la réforme systémique qu’il avait
proposée en 2017 – et qui avait obtenu le soutien de la CFDT – pour
porter une réforme paramétrique rejetée par l’ensemble des syndicats ?
Surtout : que s’est-il passé entre ce jour d’avril 2019, où le président de la République avait jugé « hypocrite »
de décaler l’âge légal de départ à la retraite, et le discours prononcé
par Édouard Philippe devant le Conseil économique, social et
environnemental (CESE), en décembre de la même année,
instaurant un âge pivot à 64 ans ? Pourquoi le travail engagé pendant
deux ans par l’ancien haut-commissaire aux retraites Jean-Paul Delevoye
n’a-t-il pas été recyclé dans le projet de 2022 ?
Pour le savoir, Mediapart a interrogé plusieurs protagonistes du quinquennat précédent (voir notre Boîte noire), ceux-là mêmes qui ont subi ou précipité de l’intérieur l’enterrement du fameux « régime universel », où «un euro cotisé [devait valoir] les mêmes droits pourtous ». Pendant longtemps, ils ont appartenu à deux camps opposés : celui des « tenants de la réforme disruptive » et celui des « chantres de l’orthodoxie budgétaire », pour reprendre les mots de l’un d’entre eux.
Les premiers ont participé à l’élaboration du programme de 2017, dont
le volet retraites était largement inspiré des travaux de l’économiste Antoine Bozio.
À l’époque, rapportent-ils avec le recul, le candidat Emmanuel Macron
n’avait pas franchement d’avis sur la question. Ce dont il était
certain, en revanche, c’était de vouloir partir en campagne avec une
grande réforme sociale qui le démarquerait de ce qui avait été fait
avant lui. Peu en importait la teneur et les détails.
De fortes résistances en interne
La réforme systémique est donc lancée cette année-là et avec elle,
tout un argumentaire développé par les auteurs du livre d’Emmanuel
Macron, Révolution (XO Éditions) : «Nous ne pouvons plusnous contenter de bricolages ou d’une énième discussion sur tel ou tel paramètre. »
Certains proches du candidat accueillent l’idée avec réticence – très
proches même puisque l’un des plus sceptiques s’appelle Alexis Kohler et
qu’il s’apprête à devenir secrétaire général de l’Élysée.
En entrant au gouvernement, les nouvelles recrues Les Républicains
(LR) enfoncent rapidement le clou. Le premier ministre Édouard Philippe,
épaulé par le ministre de l’action et des comptes publics Gérald
Darmanin, fait valoir que la trajectoire budgétaire du quinquennat ne
pourra être tenue sans quelques économies. Pourquoi ne pas rediscuter de
l’augmentation de l’âge légal de départ à la retraite ? Le chef de
l’État s’y oppose avec fermeté. Il est encore trop tôt pour se renier.
Pendant deux ans, il va confier à Jean-Paul Delevoye, l’un de ses
hommes de confiance, le soin de mener les travaux et les consultations
censés permettre de fusionner les 42 régimes existants, comme promis
pendant la campagne. Les équipes du haut-commissaire se sentent sous
surveillance étroite des juppéistes de la rue de Varenne qui ont une
peur panique des fuites inopportunes, considérant depuis toujours – ou
plus exactement depuis 1995 – que les retraites sont un sujet explosif.
C’est le début d’une lutte interne au pouvoir qui va atteindre son
apogée en 2019. Elle oppose les trois personnes les plus puissantes de
l’État après le président de la République – Alexis Kohler, le premier
ministre Édouard Philippe et son directeur de cabinet, Benoît
Ribadeau-Dumas – à celles et ceux qui s’accrochent encore à « l’ADN
macroniste », dont le conseiller élyséen Philippe Grangeon, un ancien de
la CFDT, et une bonne partie des député·es de la majorité.
Les premiers sont certes moins nombreux, mais leur voix – ils parlent
d’une seule – porte davantage. D’autant qu’ils peuvent s’appuyer sur
les derniers rapports du Conseil d’orientation des retraites (COR), ceux
des années 2017 et 2018, objectivement plus alarmants que les années
précédentes. Quant aux seconds, ils ne cessent de rappeler à Emmanuel
Macron les dangers d’une présidence oublieuse de ses promesses et des
fondamentaux de la démocratie sociale.
Le principal intéressé, lui, donne raison à tout le monde. Les
personnes qui ont pu observer son fonctionnement à l’époque sont encore
impressionnées, des années plus tard, par sa capacité à dire tout et son
contraire selon les interlocuteurs et les moments, avec une sincérité
déconcertante. Ils décrivent une plasticité qui brouille forcément le
message. Chaque visiteur repart de l’Élysée conforté, mais trompé.
Plusieurs fers sur le feu
En 2019, celles et ceux qui planchent quotidiennement sur le dossier
des retraites sont suspendus aux prises de parole publiques du chef de
l’État pour tenter de comprendre ce qu’il a vraiment derrière la tête.
Quand il déclare privilégier « un accord sur la durée de cotisation plutôt que sur l’âge », fin août, personne n’est au courant. Quand il affirme qu’il « n’adore pas le mot pénibilité », début octobre, beaucoup sursautent.
Dans les faits, le président de la République continue de laisser
deux fers sur le feu, selon l’expression d’un ancien conseiller de
l’exécutif. De son côté, Édouard Philippe répète à qui veut l’entendre
qu’il ne portera pas une réforme systémique sans mesure paramétrique. Au
gouvernement et dans l’administration, ils sont de plus en plus
nombreux à considérer que le projet initial est trop complexe. Pour
beaucoup, la « grande réforme sociale » est surtout devenue un énorme
boulet.
La fin des consultations conduites par Jean-Paul Delevoye approche,
mais Matignon, qui se montre très critique vis-à-vis du travail effectué
par l’ancien chiraquien, retarde encore le calendrier. Une énième
concertation de façade est lancée avec les partenaires sociaux afin
d’occuper le terrain. Les conditions de l’équilibre financier du futur
régime des retraites sont glissées dans le rapport. Il faut désormais
préparer les esprits à ce qu’elles figurent aussi dans le projet de
loi.
Le doute s’installe. Les syndicats sont de plus en plus échaudés, la majorité ne se remet toujours pas du mouvement des « gilets jaunes »
et la plupart des ministres veulent s’éviter des complications
supplémentaires. À force de dérogations sur telle ou telle niche,
l’exception devient la règle et le projet se transforme en gruyère. Le
haut-commissaire à la réforme des retraites est de plus en plus isolé.
Pour beaucoup, il incarne trop d’« emmerdements » – le mot est sur toutes les lèvres.
De septembre à décembre 2019, tout se joue entre quatre hommes :
Emmanuel Macron, Alexis Kohler, Édouard Philippe et Benoît
Ribadeau-Dumas. Mais en dehors de ce petit cercle, les voix discordantes
saturent l’espace public. La presse se fait l’écho d’une lecture pour
le moins surprenante des institutions en expliquant que le chef de
l’État s’est fait « tordre le bras » par son premier ministre pour instaurer l’âge pivot.
Pourtant, il ne fait de doute pour personne que le discours du CESE a
été validé par l’Élysée et que l’arbitrage final a été rendu par le
président de la République. Quinze jours plus tôt, Jean-Paul Delevoye a
capitulé dans son combat contre la mesure d’âge. Et ce n’est
certainement pas Édouard Philippe qui l’a fait renoncer. Le patron de la
CFDT est fou de rage : lui aussi avait été visiblement mal renseigné
sur les intentions réelles d’Emmanuel Macron.
Le vrai visage du chef de l’État
La suite des événements a fait l’objet d’une littérature médiatique abondante : le départ de Jean-Paul Delevoye rattrapé par ses « oublis » déclaratifs, les premières manifestations d’ampleur, le dégainage du 49-3 quelques jours seulement avant le confinement... Le 16 mars 2020, en pleine pandémie mondiale, le chef de l’État annonce la suspension de « toutes les réformes en cours », à commencer par celle des retraites. Elle ne reviendra jamais sous sa forme initiale.
Le projet présidentiel de 2022 s’écrit directement à l’Élysée,
quasiment sous la dictée d’Alexis Kohler. Celles et ceux qui étaient
favorables à la réforme systémique sont écartés d’une campagne dont le
mantra est très différent de celui de 2017. Finies les grandes idées
disruptives et dispendieuses, il faut désormais faire rentrer de
l’argent dans les caisses que le « quoi qu’il en coûte » a vidées.
Autour du président-candidat, les mentalités ont elles aussi évolué. « On s’est giscardisés, reconnaît un ancien ministre. Avec les bons côtés de Giscard, mais aussi une vision économique de droite assez classique. »
Les concepteurs du programme décident d’aller au plus simple, en optant
pour une solution comptable qui sied à merveille aux réflexes
conservateurs des « technos » qui entourent Emmanuel Macron.
Si certains de ses proches se disent encore très attachés à « l’épure macronienne » que
constituait, selon eux, le régime universel, chacun est bien conscient
de parler d’un temps révolu. Pour les déçu·es du précédent quinquennat,
le chef de l’État montre enfin son vrai visage en 2022 : celui d’un
homme animé par des valeurs qui l’éloignent définitivement de la gauche.
Pour les rares qui s’accrochent au « en même temps », il a évolué par
la force des choses.
C’est désormais une réforme purement budgétaire que les soutiens du
président de la République sont contraints de défendre, en assumant un
discours diamétralement opposé à celui qu’ils portaient quelques années
plus tôt. Cette situation a évidemment entraîné une communication hasardeuse, pour mieux masquer le caractère profondément injuste du recul de l’âge de départ à la retraite, admettent-ils sous cape.
En l’espace de six ans, l’évolution de la réforme a jeté une lumière
crue sur le pouvoir macroniste, son absence de colonne vertébrale, ses
oppositions internes, ses jeux d’influence et ses arrangements avec la
vérité. Il n’en reste aujourd’hui qu’un entêtement dangereux,
qui conduit un Parlement, sans majorité absolue, à faire le contraire
de ce que souhaitent la majorité des Français·es. Sans même y croire.
DIRECT. Réforme des retraites : le spectacle des débats à l'Assemblée nationale est "lamentable", dénonce Laurent Berger
La
première semaine d'examen du texte de la réforme des retraites, déjà
houleuse, s'est achevée par l'exclusion pour 15 jours du député insoumis
Thomas Portes, pour avoir posé, dans un tweet, le pied sur un ballon à
l'effigie du ministre du Travail Olivier Dussopt.
Ce qu'il faut savoir
"C'est un spectacle lamentable qui n'a rien à voir avec la dignité du mouvement de la rue." Le
secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, a vivement critiqué le
déroulé des débats à l'Assemblée sur la réforme des retraites, lors de
l'émission "Le Grand Jury" diffusée sur RTL, Le Figaro et LCI,
dimanche 12 février. La première semaine d'examen du texte de la réforme
des retraites, déjà houleuse, s'est achevée par l'exclusion pour 15 jours du député insoumis Thomas Portes,
pour avoir posé, dans un tweet, le pied sur un ballon à l'effigie du
ministre du Travail Olivier Dussopt. Suivez notre direct.
Le trafic a repris à l'aéroport de Toulouse-Blagnac. Le
trafic aérien a repris normalement dimanche matin à l'aéroport de
Toulouse Blagnac, selon France Bleu Occitanie. Les décollages avaient
été annulés samedi à partir de 20 heures en raison d'un mouvement de
grève des contrôleurs aériens. Le trafic aérien avait également été
perturbé à l'aéroport Paris-Orly, samedi après-midi, avec un vol sur
deux annulé.
Bruno Retailleau met en garde Aurélien Pradié. Interrogé par Le Journal du dimanche, le patron des sénateurs LR a assuré qu'Aurélien Pradié ne pourrait pas rester numéro deux du parti "s'il ne vote pas le report de l'âge légal". Le député du Lot demande des garanties sur les carrières longues, au grand dam de certains collègues des Républicains,qui s'inquiètent pour la crédibilité de la droite.Selon lui, "il faut arrêter la surenchère".
La majorité ne transige pas. Pour la députée de la majorité Stéphanie Rist, il ne s'agit pas de "faire comprendre la réforme, mais faire comprendre la réalité dans laquelle on se trouve", à savoir
"la réalité de la démographie de notre population et le fait qu'il n'y a
plus assez de jeunes pour payer les retraites des futurs retraités dès
2024-2025". L'élue de Renaissance met en avant l'importance des débats au sein du Parlement, et appelle à "aller au vote", persuadée que "Les Républicains, en cohérence, pourront voter cette réforme".
Nicolas FRAMONT
est sociologue du travail et rédacteur en chef de la revue Frustration
(un magazine web indépendant de critique sociale).YouTube · ÉLUCID · 5
mars 2022
En manif, la grève générale est déjà dans tous les esprits
Des
manifestations massives - et plus fournies que le 7 février - se sont
déroulées ce samedi dans toute la France pour contrer la réforme des
retraites, tandis que l’intersyndicale appelle à « mettre la France à
l’arrêt dans tous les secteurs » le 7 mars prochain. Reportage dans le
cortège parisien.
Le
pari des syndicats a fonctionné. Leur choix d’avoir convoqué la
quatrième journée de mobilisation contre la réforme des retraites un
samedi, afin de permettre aux familles et aux salarié·es qui ne peuvent
faire grève de venir grossir les cortèges, a manifestement payé.
Environ 963 000 manifestants, selon le ministère de l’intérieur, ont
défilé dans toute la France, pour s’opposer au projet d’Emmanuel Macron
de faire reculer l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans. Un
chiffre supérieur aux chiffres officiels de la mobilisation du 7 février
(750 000), et un peu en deçà des journées du 19 et du 31 janvier
(respectivement 1,12 et 1,27 million). La CGT avance le chiffre de
« plus de 2,5 millions » de manifestant·es.
Le vœu de Laurent Berger, patron de la CFDT, qui déclarait sur France Info vendredi que « dépasser le million de manifestants, ça serait un beau succès »,
est quasiment exaucé. La dynamique de la mobilisation reste très
solide, à l’image du record atteint à Paris, où deux cortèges amplement
fournis ont relié la place de la République à la place de la Nation, sur
des itinéraires différents.
Le ministère de l’intérieur avance le chiffre de 93 000
manifestant·es dans la capitale, tandis que la CGT a, elle, totalisé 500
000 personnes. Dans les deux cas, cela correspond à un pic depuis le
début de la mobilisation, que confirme également le cabinet Occurrence
(112 000).
Les huit syndicats de l’intersyndicale ont d’ores et déjà donné rendez-vous jeudi
16 février pour une cinquième journée de contestation. Cette fois,
leurs dirigeants se retrouveront non pas à Paris, mais à Albi,
préfecture du Tarn, manière de souligner la vigueur des mobilisations
dans des villes de taille modeste.
Surtout, ils se sont entendus sur une journée visant à « mettre la France à l’arrêt dans tous les secteurs »
le mardi 7 mars, à la sortie des vacances scolaires de l’ensemble des
zones, à un moment où le texte devrait être en débat au Sénat. La CFDT
de Laurent Berger porte donc elle aussi cet appel à une grève de 24
heures - si « le gouvernement et les parlementaires restaient sourds à la contestation populaire ».
« On n'est pas dans la logique de la grève reconductible », a pris soin de préciser le patron de la première centrale française : « Ce n'est pas un appel à la grève générale », a-t-il insisté. « La
question de la reconduction ne se décide pas au niveau des
confédérations syndicales, mais dans les entreprises et les services », a de son côté relevé Philippe Martinez, pour la CGT.
Le syndicat Solidaires, de son côté, défend une « grève reconductible à partir du mercredi 8 mars », en s’appuyant sur les secteurs de l’énergie et du ferroviaire. La CGT-Cheminots est sur une ligne identique. Les organisations syndicales de la RATP ont déjà appelé à une grève reconductible à partir de cette date.
Le succès de ce quatrième acte de mobilisation intervient à l’issue d’une première semaine
de l’examen du projet de réforme à l’Assemblée. À ce stade, un seul
article a été adopté, dans une ambiance houleuse. Il reste 16 000
amendements et 19 articles à discuter, dont le fameux septième article,
sur le report de l’âge légal, le tout d’ici au 17 février, date couperet
pour l’examen à l’Assemblée.
Une fois encore, les manifestations se sont révélées très suivies dans des villes de taille intermédiaire, et globalement en hausse
par rapport au 7 février. Ce fut par exemple le cas à Guingamp dans les
Côtes d’Armor (3 800 selon la police), à Saint-Brieuc dans le même
département (7 600), à Dole dans le Jura (2 200),
à Boulogne-sur-Mer dans les Hauts-de-France (3 500), à Agen dans le
Lot-et-Garonne (3 100) ou encore à Montauban dans le Tarn-et-Garonne (3 200).
Dans le cortège parisien, « ne rien lâcher »
Alors que l’exécutif donne l’impression de tourner le dos aux
manifestant·es, l’hypothèse qui se dessine d’une grève plus dure, à
partir de la fin des vacances scolaires, trouvait de nombreux échos dans
le cortège parisien.
Xavier, 43 ans, et Caroline, 44 ans, sont venus d’un village de
l’Essonne pour manifester ce samedi, tous deux syndiqués à la CFDT, dans
la fonction publique. Lui en est à sa troisième marche depuis janvier,
elle à sa première. Leur fils Paul, dix ans, défile pour la première
fois de sa vie à leur côté. Le couple se dit ouvert à l’idée de faire
grève le 7 : « Il ne faut rien lâcher. On se bat aussi pour notre fils. Ce n’est pas nous qui cherchons l’escalade, c'est le gouvernement. »
« Je suis déterminée, assure de son côté Véronique, cheminote CFDT.
Et prête à aller jusqu’à la grève générale le 7 mars s’il le faut,
parce que nos gouvernants sont complètement déconnectés de nos réalités,
ils ne sont pas dans notre monde et ils nous prennent pour des cons. » Elle dit encore, quand on lui parle de la culture réformiste de son organisation : « À la CFDT, c’est vrai qu’on n’est pas jusqu’au-boutiste, mais quand il faut y aller, on y va et cette fois on va y aller. »
Non loin dans le cortège, Gilles, un autre cheminot CFDT, précise aussi :
« C’est important pour nous que le mouvement soit interprofessionnel.
On se sent rassemblés et légitimes. On se sent nombreux et mieux
entendus de la population. »
À 59 ans, Michel défilait pour la première fois ce samedi contre la
réforme des retraites. Il est venu des Yvelines avec les camarades de la
CFTC Transports : « Je ne pouvais pas me permettre de faire grève,
je touche à peine plus que le SMIC alors que je suis en fin de carrière.
Mais je ne comprends pas comment Macron peut vouloir faire cette
réforme comme si on avait voté pour lui alors qu’on a voté contre Marine
Le Pen. »
Il a commencé à travailler à 17 ans comme chauffeur-livreur, lorsque
La Poste a perdu le monopole de diffusion des petits colis au début des
années 1980. Croit-il à l’efficacité de ces défilés à répétition ? « Je suis optimiste, si on est de plus en plus chaque samedi, ça peut les faire reculer. » Envisagerait-il de se joindre à un mouvement de grève générale ? « Rien n’est impossible », sourit-il, hésitant.
Mélanie, 42 ans, travaille au musée du Louvre. Sur son dos, elle a reproduit le célèbre tableau
de Géricault, retitré pour l’occasion « Le radeau des retraité.es ».
Syndiquée chez Sud, elle assure que les salarié·es de la « catégorie
C », qui exercent les métiers les plus pénibles - agents de
surveillance, magasinage, etc. - n’auront plus la force de travailler
au-delà de 62 ans.
Elle fait partie des plus impatient·es dans le cortège : « Il faut passer à la grève reconductible, c'est sûr que le gouvernement ne bougera pas avec quatre manifs. » Et de s’interroger : « Une grève le 7 mars, c’est bien, mais ça arrive peut-être un peu tard : entre le 16 février et le 7 mars, il se passe quoi ? »
Un peu plus loin, Laëtitia, professeure d’anglais de 51 ans dans un
collège de Montreuil, non syndiquée, a été de toutes les manifestations
depuis janvier. « Et je ferai toutes les prochaines », sourit-elle. Juge-t-elle que le mouvement social peut continuer ainsi, de manifestation en manifestation ? « J’ai
beau espérer que ça marche, j’ai aussi peur que ça ne marche pas. Il
faudrait en passer par un état de grève générale. C’est aussi pour ça
qu’on est là, pour faire pression sur les syndicats réformistes et
Laurent Berger. »
Quand Emmanuel Macron invite à dîner Juan Carlos, ancien roi devenu infréquentable en Espagne
Le
chef de l’État invite à dîner ce vendredi l’écrivain Mario Vargas
Llosa, qui vient d’entrer à l’Académie française. Sur la liste des
invités figure l’ami de ce dernier, Juan Carlos Ier, roi émérite
d’Espagne, déchu en 2014 et exilé à Abou Dhabi pour ne pas ternir
l’image de la monarchie.
(HONTE A À
peine de retour d’un Conseil européen à Bruxelles, aimanté par la
présence du président ukrainien Volodymyr Zelensky, Emmanuel Macron
reçoit à dîner à l’Élysée, ce vendredi. Le chef d’État tient à rendre
hommage, au lendemain de la cérémonie d’entrée de Mario Vargas Llosa à l’Académie française, à l’écrivain péruviano-espagnol, nobélisé en 2010.
Le projet avait été ébruité par le quotidien catalan La Vanguardia,
en marge du sommet franco-espagnol qui s’était tenu le 19 janvier à
Barcelone : au détour d’une visite du musée Picasso, il avait invité
l’écrivain Javier Cercas – avec lequel il s’est déjà longuement entretenu pour le journal El País – à ce dîner privé.
Vargas Llosa, natif d’Arequipa dans le sud du Pérou, âgé de 86 ans,
fut l’une des figures d’un courant littéraire baptisé le « boom
latino-américain ». Lui qui vécut un temps à Paris, au début des années
1960, est l’auteur de textes décisifs, dont Conversation à la cathédrale, inspiré de l’expérience de la dictature d’Odría au Pérou, de 1948 à 1956.
Il est aussi devenu une figure politique controversée, apportant son
soutien à des candidats de droite ou d’extrême droite en Amérique latine
et en Espagne. Il a par exemple pris le parti de José Antonio Kast, nostalgique de Pinochet,
face à Gabriel Boric aux élections chiliennes de 2021, celui de Keiko
Fujimori, fille de l’ancien dictateur péruvien, contre Pedro Castillo
aux élections péruviennes de 2021, ou encore de Jair Bolsonaro contre Lula aux élections brésiliennes de l’an dernier.
Dans la crise actuelle au Pérou, il a ménagé
la présidente par intérim, Dina Boluarte, malgré la soixantaine de
morts victimes de la répression militaire dans les Andes. À Madrid,
l’écrivain rate rarement une occasion de dire le bien qu’il pense de la
vedette controversée de la droite espagnole, Isabel Diáz Ayuso, que
certains critiques, au sein même de son proche camp, rapprochent d’un Donald Trump.
Si l’on en croit les thèses du politiste Ignacio Sánchez-Cuenca, Vargas Llosa incarne à la perfection dans le débat public une forme de « machisme discursif », au service d’opinions qui tournent le dos aux travaux des sciences sociales, mais «qui fondent leur autorité sur la seule identité de celui qui les émet ».
Mais c’est un autre invité à la table d’Emmanuel Macron, ce vendredi soir, dont la présence interroge : Juan Carlos Ier.
L’ancien monarque espagnol, déchu en 2014 après 38 ans de règne, a fait
le voyage d’Abou Dhabi pour assister à la cérémonie d’investiture à
l’Académie à Paris.
Vargas Llosa l’a invité à Paris au nom de leur amitié – « dans la mesure où les rois peuvent entretenir des amitiés, je suis ami avec lui », a expliqué
l’écrivain. Juan Carlos avait été le premier à féliciter Vargas Llosa
lorsque ce dernier avait obtenu, en 1993, la nationalité espagnole,
affirmant qu’il était très content qu’il devienne « son sujet ».
Dans une analyse
récente, le journal InfoLibre (partenaire de Mediapart) écrit que
Vargas Llosa, 86 ans, et Juan Carlos, 85 ans, incarnent un même type de « masculinité d’une autre époque », où les femmes sont condamnées à jouer les seconds rôles.
Du côté de l’Académie française, son secrétaire perpétuel (sic),
Hélène Carrère d’Encausse, qui s’était déjà beaucoup démenée pour
l’élection de Vargas Llosa à l’Académie (malgré le fait qu’il dépassait
la limite d’âge, notamment), s’est félicitée de la présence de l’ancien
roi, interrogée là encore par El País : « Il a été roi d’Espagne. Nous n’allons pas le traiter comme s’il était le concierge [des lieux]. Nous le devons à l’Espagne. »
Emmanuel Macron semble être sur la même longueur d’onde que
l’historienne. Joint à plusieurs reprises par Mediapart, l’Élysée n’a
pas confirmé la présence de Juan Carlos Ier au dîner. Mais la presse espagnole a écrit qu’il avait bien été invité, et le fils de Mario Vargas Llosa, Álvaro, s’est fendu jeudi d’un message sur Twitter : « Macron les a invités à dîner tous les deux. »
Une fin de règne ternie par de nombreux scandales financiers
Juan Carlos Ier a longtemps été perçu – et cette vision
domine sans doute encore largement en France – comme le monarque de la
transition, celui qui a su, après la mort de Franco en 1975, mettre en
place puis consolider les bases de l’actuelle démocratie parlementaire.
Il joua un rôle clé, en particulier, pour faire échouer la tentative de
coup d’État de février 1981, celle-là même que décrit avec brio Javier
Cercas dans Anatomie d’un instant (2009).
Mais la fin du règne de Juan Carlos fut bien plus controversée. Au
moment où son pays s’enfonçait dans les programmes d’austérité et la
contestation sociale des indignados (les « indignés »), lui menait, en 2012, une luxueuse chasse à l’éléphant au Botswana, qui lui avait par ailleurs provoqué une fracture à la hanche.
Surtout, il a terminé son règne cerné par les scandales financiers,
après avoir amassé une fortune colossale, chiffrée à 1,8 milliard
d’euros par le New York Times en 2014. Si plusieurs monarchies du Golfe ont enrichi le monarque, ce sont ses relations avec l’Arabie saoudite qui l’ont fragilisé.
Des enregistrements de son ancienne maîtresse, l’Allemande Corinna Zu Sayn-Wittgenstein, puis des révélations de la Tribune de Genève, ont établi que
Juan Carlos avait reçu, en 2008, 100 millions de dollars du roi
Abdallah d’Arabie saoudite, sur un compte en Suisse d’une fondation
panaméenne. C’était une commission liée à la signature d’un contrat de
près de sept milliards d’euros pour la construction d’un train à grande
vitesse entre La Mecque et Médine par un consortium d’entreprises
espagnoles.
Plusieurs enquêtes ont été ouvertes en Espagne, liées à ces donations
de l’Arabie saoudite, à des comptes en Suisse ou à des fonds non
déclarés au fisc espagnol. Mais toutes ont été classées sans suite, soit
parce qu’il jouissait de l’inviolabilité royale garantie par la
Constitution au moment des faits, soit parce que les délits qui lui
étaient reprochés étaient prescrits, soit parce qu’il a régularisé – en partie – sa situation fiscale.
En exil depuis 2020, Juan Carlos est revenu sur le sol espagnol en
mai 2022 pour un séjour express qui n’a pas manqué de provoquer la polémique.
Trop sulfureux, il n’avait pas été autorisé par son fils, Felipe VI, à
passer la nuit à la Zarzuela, l’une des résidences de la famille
royale.
D’après de nombreux observateurs,
la perspective d’un retour définitif du roi émérite en Espagne, dans
l’air depuis que toutes les enquêtes le visant ont été classées, a été
repoussée à l’après-élections générales. Celles-ci doivent avoir lieu,
au plus tard, en décembre 2023.
Malgré les affaires, l’amitié de Mario Vargas Llosa avec Juan Carlos a
donc tenu bon. Ce n’est pas forcément une surprise, alors que
l’écrivain avait été épinglé par deux fois pour des pratiques d’évasion
fiscale, d’abord dans les Panama Papers en 2016, puis les Pandora Papers en 2021. Qu’on se rassure, tous ces sujets ne seront sans doute pas évoqués vendredi soir, autour de la table du dîner de l’Élysée.