Lors d’une manifestation contre les projets du gouvernement, à Tel-Aviv (Israël), le 14 janvier 2023.

Depuis le retour de Benyamin Nétanyahou au pouvoir, le 29 décembre 2022, les manifestations hebdomadaires après shabbat, le samedi soir, ont repris en Israël. En 2020, la mobilisation avait duré des mois contre le premier ministre poursuivi pour corruption ; elle renaît, encore plus massive, depuis que son nouveau gouvernement d’extrême droite a prêté serment. Quelque 70 000 manifestants selon la police sont descendus dans les rues de Tel-Aviv, samedi 14 janvier – la plus importante mobilisation de ces dernières années.

Le cortège débordait jusque dans les rues adjacentes à la place Habima, au cœur de la ville, marée de parapluies et de drapeaux israéliens au milieu desquels émergeaient quelques bannières LGBT. La majorité protestait contre la réforme de la justice, dévoilée le 4 janvier par le garde des sceaux, Yariv Levin. Le gouvernement entend notamment affaiblir le pouvoir de supervision de la Cour suprême sur les lois votées par les députés à la Knesset et voudrait politiser les nominations des juges et des conseillers légaux.

Devant les manifestants, l’ex-ministre de la justice Tzipi Livni a accusé la coalition de « procéder à une prise de contrôle politique du pays et de mener une guerre contre ses institutions démocratiques ». « Dé-mo-cra-tie ! », ont scandé en chœur les manifestants. Dans la foule, majoritairement composée d’Israéliens laïcs et libéraux, dont Tel-Aviv est le bastion, on s’inquiète des orientations du gouvernement. « On ne veut pas devenir une théocratie ; les membres de la coalition sont des extrémistes religieux », explique Thomas Ofir, 26 ans, étudiant. D’autres craignent des discriminations contre la communauté LGBT.

Critique inédite

« Il y a quelques mois, il y a eu une énorme manifestation, la mère de toutes les manifestations. Des millions de personnes sont descendues dans les rues pour aller voter », leur a rétorqué, dimanche, Benyamin Nétanyahou lors du conseil des ministres. Or, si le premier ministre peut se prévaloir d’une confortable majorité, après quatre ans d’instabilité politique, il doit également faire face à la fronde des institutions qui, en Israël, président aux destinées du pays – parfois même davantage que les éphémères coalitions politiques.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés En Israël, la mutation du sionisme et ses périls

La critique la plus virulente est venue de la présidente de la Cour suprême, Esther Hayut. Elle est inédite : jamais une juge à la tête de cette institution n’était ainsi sortie de sa réserve. « Il s’agit d’une attaque débridée contre le système judiciaire, comme s’il représentait un ennemi qui devait être combattu et écrasé », a tancé la magistrate, le 12 janvier, lors d’une conférence à Haïfa, dans le nord du pays. Des rumeurs laissent entendre qu’elle démissionnera si la réforme est adoptée.

Il vous reste 54.77% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.