Nouvelle journée de mobilisation dans toute la France contre la loi « sécurité globale »
La justice a autorisé, vendredi, la manifestation parisienne prévue samedi, que la Préfecture de police avait décidé d’interdire pour éviter notamment la propagation du coronavirus.
De nouvelles manifestations sont prévues en France, samedi 28 novembre, contre la proposition de loi « sécurité globale » et sa mesure-phare, qui prévoit de restreindre la possibilité de filmer les forces de l’ordre, alors que l’opposition au texte est désormais exacerbée par une série d’affaires de violences policières.
La manifestation prévue à Paris, mais interdite par la Préfecture de police, qui préconisait un rassemblement, pourra finalement bien se tenir après une décision, vendredi, du tribunal administratif.
« Le tribunal administratif de Paris vient de suspendre l’arrêté d’interdiction du préfet de Paris. La #Marchedeslibertés aura bien lieu demain de République à Bastille à 14 heures. Nous défendrons toutes les libertés », a écrit vendredi sur Twitter Arié Alimi, l’avocat du collectif opposé à cette loi, également membre du bureau national de la Ligue des droits de l’homme.
Le collectif « Stop loi sécurité globale », composé de syndicats de journalistes, d’ONG de défense des droits de l’homme et d’associations, réclame le retrait de la proposition de loi des articles 21, 22, « qui organisent une surveillance de masse », et de l’article 24, qui prévoit de pénaliser la diffusion « malveillante » de l’image des policiers, ainsi que le retrait du nouveau schéma national du maintien de l’ordre, qui inquiète le monde de la presse.
Paris, Bordeaux, Lyon, Strasbourg, Marseille, Grenoble, Clermont-Ferrand, Caen… Après des manifestations samedi dernier, de nouvelles « marches des libertés » sont prévues samedi dans plus de soixante-dix villes, ainsi que devant les ambassades de France à La Haye et Berlin, selon le collectif. Vendredi, environ 3 500 personnes, selon la police, entre 6 000 et 7 000 selon l’intersyndicale, ont manifesté à la nuit tombée à Nantes contre la proposition de loi.
Un texte « liberticide »
La Préfecture de police avait décidé d’interdire par arrêté la manifestation parisienne de samedi pour éviter notamment la propagation du coronavirus, autorisant toutefois un rassemblement place de la République. Le collectif Stop loi sécurité globale avait alors déposé une demande de suspension en référé-liberté, évoquant un procédé « inacceptable, alors que des marches sont autorisées dans d’autres villes en France ».
Selon les informations du Monde, une centaine d’élus de Paris et d’Ile-de-France seront présents samedi « pour regarder, pour témoigner, si des violences devaient avoir lieu ». La proposition de loi, adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale mardi 24 novembre, suscite une importante mobilisation chez les journalistes et au-delà. Ses opposants dénoncent un texte « liberticide ».
La mobilisation a trouvé un nouvel écho après la diffusion par le média Loopsider d’images de violences policières à l’encontre d’un producteur de musique, Michel Zecler. Publiées jeudi, les images glaçantes de cette violence débridée ont été vues plus de 13 millions de fois sur Twitter, faisant de cette vidéo l’une des plus virales sur le réseau social en France.
Dans ce contexte tendu, Emmanuel Macron est descendu vendredi dans l’arène pour dénoncer une « agression inacceptable » et des images qui « nous font honte ». Il a demandé de nouveau au gouvernement de lui faire rapidement des propositions « pour lutter plus efficacement contre toutes les discriminations ».
L’exécutif marche sur des œufs
Qu’adviendrait-il si les policiers ne pouvaient plus être filmés ?, interrogent les détracteurs de la loi « sécurité globale », qui redoutent la portée de son article 24. Après avoir modifié le texte pour inclure des garanties sur le « droit d’informer », le gouvernement a passé la semaine à tenter de déminer ce dossier.
En vain : malgré l’adoption du texte par les députés, la polémique était telle que Matignon s’est résolu à annoncer une nouvelle réécriture par une « commission » indépendante… avant de rétropédaler face à l’ire des parlementaires et de la majorité, à qui Jean Castex a dû assurer qu’ils auraient le dernier mot.
L’exécutif doit faire face à d’autres affaires de violences et d’abus policiers, notamment l’évacuation controversée d’un camp de migrants place de la République à Paris lundi soir, dont les images ont provoqué des haut-le-cœur au sein même de sa majorité.
Signe du malaise ambiant, Gérald Darmanin a été dépêché au 20 heures de France 2, jeudi soir, pour faire passer un message d’apaisement. Le ministre de l’intérieur a affirmé que les policiers mis en cause dans le passage à tabac du producteur de musique avaient « sali l’image de la République ». Dans le même temps, il a assumé l’évacuation violente du camp de la place de la République, et a balayé tout éventuel retrait de l’article 24.
La manifestation contre la proposition de loi « sécurité globale » prévue samedi 28 novembre à Paris se déroulera sous haute surveillance. Celle de la police, évidemment. Mais aussi celle de nombreux élus de gauche. Une centaine d’entre eux ont annoncé, vendredi, leur intention de participer à cette manifestation qui avait initialement été interdite par la préfecture de police, avant d’être autorisée après une décision en référé du tribunal administratif. Ils entendent être présents « pour regarder, pour témoigner si des violences devaient avoir lieu », indiquent-ils dans un texte commun.
Parmi les signataires figurent Julien Bayou, le secrétaire national d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV), ainsi que Benoît Hamon (Générations), tous les deux conseillers régionaux. De nombreux membres de la majorité rose-rouge-verte qui dirige Paris annoncent également leur venue, à l’image d’Audrey Pulvar, Ian Brossat (PCF) et David Belliard (EELV), trois des adjoints de la maire Anne Hidalgo. L’initiative a été coordonnée par les élus de Générations Frédéric Hocquard et Nathalie Maquoi.
Les élus en cause soulignent qu’ils ont déjà été témoins à plusieurs reprises de « nombreuses dérives » en matière de maintien de l’ordre, en particulier lundi 23 novembre, lors de l’évacuation d’un campement de migrants place de la République (10e arrondissement). Cette opération « a donné lieu à une véritable chasse à l’homme », soulignent-ils. Ajoutant : « nous pensons qu’il est de notre devoir d’être présent.es pour témoigner et dénoncer de tels faits s’ils devaient se reproduire ».
Le Monde
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