Aurélien Taché, ex-macronien : "Marine Le Pen se frotte les mains, on lui déroule le tapis rouge
Jean Castex veut "renouveler" prochainement l'Observatoire de la laïcité, une instance placée sous son autorité et dont "le statut et les missions font l'objet d'une réflexion" afin d'être davantage "en phase" avec le futur projet de loi de lutte contre les séparatismes. Selon Matignon, "il doit être possible en France de défendre la laïcité sans être taxé d’islamophobie et de défendre la laïcité sans être instrumentalisé politiquement."
L'ex-"marcheur" Aurélien ne comprend pas la remise en cause de l'Observatoire de la laïcité présidé par Jean-Louis Bianco et plus globalement les propos de l’exécutif depuis l'assassinat de
FRANCE INTER : Matignon semble considérer que l'Observatoire de la Laïcité a fait preuve de naïveté et doit évoluer, "parce qu'on ne peut pas se contenter de publication de rapports et de guides pédagogiques pour accompagner l'action du gouvernement" Que répondez-vous ?
AURÉLIEN TACHÉ : "Je pense que c'est ce gouvernement qui fait preuve de naïveté quand il ne voit pas que ceux qui se prétendent les meilleurs défenseurs de la laïcité sont souvent des gens qui préfèrent être dans une accointance avec ceux qu'ils ont toujours combattu par le passé : soit une droite un peu conservatrice, identitaire, catholique, soit carrément l'extrême droite. Ces gens là ont un agenda politique qui n'est pas de défendre la laïcité mais qui est bien de s'en prendre à certains Français en raison de leur religion ou de leur culture pour bien leur signifier qu'ils sont moins Français que les autres.
Et en pensant "faire barrage à l'extrême-droite", pour reprendre l'expression de l'entre-deux tours de l'élection présidentielle, ils ne se rendent pas compte qu'ils sont en réalité en train de lui dérouler le tapis rouge. Jamais Marine Le Pen ne se sera autant frottée les mains. N'oublions pas que les fondamentalistes terroristes islamistes et l'extrême-droite ont le même agenda. Celui de montrer qu'on ne peut pas vivre ensemble en France si on a des religions ou des cultures différentes. Ça me paraît d'une naïveté confondante, d'une absence de recul politique et de hauteur absolument terribles. Ces gens là passent leur temps à donner des leçons politiques alors qu'ils ne comprennent pas ce dont ils parlent. Je suis très inquiet pour mon pays.
Plus grave, ils ne savent vraiment pas de quoi ils parlent, au moins à l'époque de Manuel Valls, il y avait des gens qui avaient la connaissance du dossier. Là ce sont des ignorants, il n'y en a qu'un qui sait : c'est le Président de la République. Et lui le fait par tactique politique. Ça veut bien dire qu'il accepte."
On accuse la gauche de naïveté, certains au sein même de l'Observatoire d'avoir pensé la lutte contre l'islamisme politique avec des lunettes du XXe siècle alors que les attentats d'aujourd'hui prouvent que la menace a changé ?
"Mais ce sont eux qui ont failli. Eux ce sont les élites, que ce soit autour d'Emmanuel Macron aujourd'hui, oui celles qui étaient au pouvoir auparavant. Ce sont elles qui n'ont pas su faire la place à des Français issus de l'immigration, à cette jeunesse issue de l'immigration. On les a oubliés dans des quartiers où il ne sont qu'entre eux, où il y a moins de services publics qu'ailleurs, où il y a plus de difficultés qu'ailleurs et où vous avez des groupes religieux qui arrivent et qui disent : 'Vous n'êtes pas dupes, vous voyez bien ce qui se passe. Vous n'êtes pas à égalité avec les autres Français. Et en plus maintenant on s'en prend à votre religion.' Ils ont failli à faire France. Ils ont failli à faire que face à cela la seule réponse soit : 'ce pays est le mien, ce pays m'a accueilli, a accueilli mes parents, mes grands-parents et je m'y sens bien.' Et qu'à l'inverse, ils trouvent dans la politisation de l'islam une réponse. Ce sont ces gens-là qui sont restés sur des échecs du XXe siècle plus que des gens comme nous qui rappelons sans cesse qu'il y a eu échec sur ces sujets-là."
"Le Président de la République, au soir de l'attaque de Conflans-Sainte-Honorine, a pourtant eu ces mots : "Ils ne nous diviserons pas, ils ne passeront pas"
"Cette récupération du "No Pasaran" des anarchistes espagnols est malvenue. Très malvenue. Ces gens-là n'étaient absolument pas dans une conception autoritaire ou excluante des choses. C'était véritablement des militants anti-facistes face à Franco. Qu'on fiche la paix à ceux qui ont véritablement combattu l'extrême-droite. J'accuse cette récupération politique qui a été faite vendredi soir par Emmanuel Macron et que la majorité tente de refaire. On confond tout. 'No Pasaran' c'était ceux qui s'opposaient au fascisme en refusant de faire toute distinction de religion ou de culture. Et là en France, il se passe tout l'inverse. Quand vous avez Marine le Pen qui est reçue par Gérald Darmanin et qui dit : 'C'est formidable, je n'ai jamais été reçue par le ministre de l'Intérieur auparavant et nous sommes d'accord sur tour. Je regrette juste de ne pas avoir vu la ministre Marlène Schiappa pour pouvoir la féliciter en direct'. Il y a des questions à se poser.
Le ressort des idéologies islamistes, fascistes ou d'extrême-droite est le même : c'est celui de la haine. Ces gens veulent désigner des ennemis. Il n'y a pas à désigner d'ennemis autres que ceux qui s'en prennent aux principes démocratiques. Et encore une fois, on a du côté de l'extrême-droite des gens qui sont aussi virulents et dangereux que ceux que l'on trouve du côté des islamistes. Aujourd'hui je suis inquiet, on remet en cause le Conseil Constitutionnel, l'Observatoire de la laïcité dont la fonction est de faire respecter la loi de 1905, et on a un ministre de l'Intérieur qui envoie des policiers chez des gens, même si ça n'a rien à voir avec l'enquête juste 'pour faire passer des messages'. Tout cela est inquiétant. Tout cela c'est l'agenda d'une droite nationaliste qui veut s’asseoir sur les droits de l'Homme et des libertés. On sort de la démocratie et tout cela m'effraie beaucoup."
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