vendredi 3 février 2023

FRANCE TELECOM, "ENTREPRISE SYMBOLE DE LA SOUFFRANCE AU TRAVAIL" OU 19 SALARIES SE SONT SUICIDES / UN PEU TARDIVEMENT, SOUVENONS-NOUS... (1)




Harcèlement moral à France Télécom : peine allégée en appel pour l’ex-PDG Didier Lombard

Aujourd’hui âgé de 80 ans, il a été condamné à un an de prison assorti en totalité du sursis, contre quatre mois de prison ferme en première instance, ainsi qu’à 15 000 euros d’amende.

Le Monde avec AFP

Publié le 30 septembre 2022 à 10h30, mis à jour le 30 septembre 2022 à 14h52 
 
Didier Lombard, le 6 mai 2019, à Paris.

L’ex-président-directeur général (PDG) de France Télécom Didier Lombard a vu sa peine allégée, vendredi 30 septembre. La cour d’appel de Paris l’a condamné pour harcèlement moral institutionnel à un an de prison assorti en totalité du sursis, contre quatre mois de prison ferme en première instance, en 2019. La cour a expliqué dans un communiqué avoir « considéré le harcèlement institutionnel [comme] caractérisé ». France Télécom est la première société du CAC 40 à avoir été condamnée pour harcèlement moral institutionnel.

« En dépit d’alertes multiples, les agissements harcelants induits par l’objectif de déflation des effectifs imposé par les dirigeants ont créé un climat d’insécurité permanent pour tout le personnel, avec des conséquences en cascade, aboutissant pour un certain nombre de salariés à des dépressions, des tentatives de suicide et des suicides », a-t-elle précisé. Le tribunal avait alors examiné en détail les cas de 39 salariés, dont 19 se sont suicidés, douze ont tenté de le faire et huit ont subi un épisode de dépression ou un arrêt de travail.

M. Lombard, aujourd’hui âgé de 80 ans, s’est par ailleurs vu infliger la même amende, d’un montant de 15 000 euros, que celle prononcée en première instance. Son numéro 2 à l’époque des faits (2007-2008), Louis-Pierre Wenès, est également condamné en appel à un an de prison assorti du sursis et 15 000 euros d’amende, plus de douze ans après la vague de suicides de salariés du groupe. Deux autres cadres de l’entreprise ont, en revanche, été relaxés, « faute de caractérisation d’une contribution active », a annoncé la cour dans son communiqué.

« Cette décision infirme la décision prise en première instance. Vous n’effectuerez pas cette peine d’emprisonnement », a expliqué la présidente de la cour, Pascaline Chamboncel-Saligue. Et de conclure :

« L’arrêt ne satisfait pas tout le monde, la cour (…) espère que les uns et les autres vous pourrez continuer votre chemin et que vous n’aurez plus affaire à la justice. »

Le ministère public avait requis un an de prison, dont six mois avec sursis, et 15 000 euros d’amende pour MM. Lombard et Wenès, condamnés en première instance pour leur « rôle prééminent » dans la mise en place d’une politique de réduction des effectifs « jusqu’au-boutiste » sur la période 2007-2008 chez France Télécom.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés France Télécom : le parquet requiert la confirmation de la condamnation des ex-dirigeants pour « harcèlement moral institutionnel »

Des départs « en marche forcée »

Les deux ex-dirigeants du groupe (devenu Orange en 2013) ont fait face à la justice en raison de la mise en place en 2006 de deux plans de restructuration (de 2007 à 2010) consécutifs à la privatisation de l’entreprise (2004) et prévoyant le départ de 22 000 employés et la « mobilité » de 10 000 autres (sur quelque 120 000 salariés). Entre 2006 et 2008, 16 000 emplois ont été supprimés.

Ces départs « en marche forcée » avec « des méthodes interdites » avaient entraîné une « dégradation des conditions de travail » de « milliers de salariés », dont certains se sont suicidés. La crise a éclaté au grand jour après le suicide en juillet 2009 de Michel Deparis, un technicien marseillais ayant mis directement en cause France Télécom dans une lettre.

L’entreprise est devenue le symbole de la souffrance au travail : elle a été sanctionnée en 2019 de l’amende maximum de 75 000 euros dans un jugement historique, contre lequel elle n’a pas fait appel, devenant la première société du CAC 40 condamnée pour un « harcèlement moral » institutionnel. L’ex-DRH Olivier Barberot, condamné lui aussi en première instance à un an de prison dont huit mois avec sursis et 15 000 euros d’amende, s’était pour sa part désisté de son appel.

« Une décision historique »

« Aujourd’hui est un jour où je peux enfin tourner la page après quinze ans de souffrances à France Télécom, après qurante ans de carrière. J’ai beaucoup souffert de l’“ère Lombard” : quinze ans de burn-out, trois accidents du travail, dont une tentative de suicide sur mon lieu de travail en 2011 », a réagi Béatrice Pannier, 59 ans, soulagée de cette décision, conforme à ce qu’elle attendait « en tant que partie civile ».

 

(1)  On se souvient tous.tes d'un nom au moins, celui du PDG Lombard... Il a bénéficié d'une quasi annulation de sa peine, ce qui "ne satisfait pas tout le monde"...

J.P. C.

Aucun commentaire: