Un
été d’images d’herbes brunies, de rivières asséchées, de paysages
jaunis, et l’impression de voir le monde en mauvais sépia. C’est là le
nouveau régime du visible paradoxal qui caractérise cette saison, où la
pénurie devient tangible, où le manque se fait substantiel, où, comme
dans le portfolio de Lucien Migné
sur la pénurie d’eau au Liban, l’assoiffement apparaît clair comme de
l’eau de roche. L’obscénité des inégalités, aussi : d’un côté, des
libanais·es qui s’organisent pour survivre au compte-goutte et des
enfants qui font des réserves ; de l’autre, des oasis pour riches où la
privation n’est qu’une réalité abstraite.
Mettre
moins d’eau dans les bouilloires, prendre des douches froides… Les
injonctions aux gestes individuels qui fleurissent partout en Europe
apparaissent, face à ces images, dans toute l’étendue de leur inanité.
C’est ce que déplorent, dans une tribune parue ce jour, quatre élu·es européens, en s’attaquant à l’écologie des demi-bouilloires – et des demi-mesures. « Si
des changements dans nos modes de vie sont nécessaires, écrivent-ils,
nous ne pouvons attendre des individus qu'ils compensent là où nous,
politiques, manquons de responsabilité pour engager les secteurs les
plus polluants ou énergivores. » L'urgence est aux transformations politiques structurelles, contre ce qu’ils nomment « capitalisme fou ».
En
juin, Catherine MacGregor, directrice générale d’Engie, Jean-Bernard
Lévy, président-directeur général d’EDF, et Patrick Pouyanné,
président-directeur général de TotalEnergies avaient appelé dans le JDD à une « sobriété d’urgence ». Une autre tribune,
écrite cette fois-ci par des professionnel·les et ingénieur·es
travaillant dans l’énergie, avait dénoncé avec autant de force cette
grande tartufferie capitaliste. Certes, les « Amish » avaient gagné un bout de bataille culturelle. Mais si « un mea culpa eût été le bienvenu », notaient-ils, « difficile de demander pardon pour des erreurs dans lesquelles on continue de foncer tête baissée. » Un « sécessionnisme des riches que le gouvernement acte en perpétuant le statu quo climatique », résumait récemment Mickaël Correia dans le journal.
Alors
que gouvernants néolibéraux et autres acteurs du capitalisme financier
enjoignent à la frugalité en poursuivant la débauche climaticide,
certain·es mènent des réflexions depuis longtemps sur la redéfinition
des besoins artificiels en contexte d'inégalités sociales – et n’ont
évidemment pas attendu les lamentations factices d’un PDG de
TotalEnergies pour le faire. Des textes à (re)lire ci-dessous.
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